''J'ai peur, donc j'y vais''
Le 1er avril 1921, Adrienne Bolland, 25 ans, devient le premier pilote (hommes et femmes confondus) à réussir la première traversée par avion de la Cordillère des Andes.
Cette traversée, elle va l'effectuer à bord d'un Caudron G.3.
Petit retour sur cet immense exploit - et comme d'habitude, au travers de quelques objets de collection 😉
<< Toute petite bonne femme de rien du tout >> comme elle se définit elle-même, Adrienne Bolland (née le 25 novembre 1895) à un caractère bien trempée.... A l'aube de ses 25 ans, en novembre 1919, elle ''débarque'' chez le constructeur Caudron pour devenir pilote. Elle obtient son brevet de pilote le 26 janvier 1920, et le 1er février, René Caudron l'embauche comme pilote d'essais. C'est la 13ème femme à obtenir son brevet de pilote et ELLE sera le premier pilote d'essais qui exercera chez Caudron.
Le 25 août 1920, elle devient la deuxième femme (et première française) à traverser la Manche - mais la première à le faire dans le sens France - Angleterre.
Adrienne Bolland est la seule femme à participer au rassemblement aérien de Buc du 8 au 10 octobre 1920. C'est là qu'elle entend parler pour la première fois des ''macchabées de la Cordillère des Andes'', ces pilotes ayant perdu la vie een tentant la traversée.
Elle demande à Caudron d'y aller. Il refuse. << Juste pour voir... >> ajoute t-elle.
Finalement, Adrienne Bolland part en janvier 1921 pour Buenos Aires en Argentine. Elle est accompagnée de deux appareils, démontés dans des caisses, des Caudron G.3, et d'un mécanicien René Duperrier. Son rôle, à Adrienne Bolland, est de présenter l'appareil en Argentine pour qu'il soit vendu - une représentation publicitaire en quelque sorte.
(le seul Caudron G.3 volant encore - La Ferté-Alais 2018) |
La renommée d'Adrienne Bolland est telle, que peu de temps après son arrivée, la presse argentine la met carrément au défi de traverser la Cordillère des Andes. C'est à partir de ce moment-là qu'elle pense à le faire. Elle demande à René Caudron de lui envoyer un avion plus puissant, mais celui-ci refuse ! Que cela tienne, elle le fera quand même, même à bord d'un Caudron G.3.
Le 20 mars 1921, elle part en train à Mendoza, ville argentine au pied de la Cordillère. Une fois l'avion remonté, elle fait deux vols d'essais en ville puis, le 1er avril, à l'aube, elle s'envole en direction de Santiago du Chili, de l'autre côté de la Cordillère.
Adrienne Bolland a choisi une route directe (contrairement à tous ses prédécesseurs) par le Col de la Cumbre, mais elle doit passer à proximité de l'Aconcagua, le plus haut pic de la Cordillère, qui culmine à 6 962 mètres, alors que son Caudron G.3 à un plafond de 4 000 mètres - elle aperçoit une petite brèche et réussit à passer juste au-dessus, à environ 4 200 mètres d'altitude.
Elle vole sans carte ni instruments de navigation, uniquement à vue. Elle vole sans pare-brise et dans le froid... Elle s'est enduit le corps de graisse (et de papier journal) pour lutter contre ce froid intense qui l'attend (d'où les photos avec le visage sale qui ont été publiées après l'exploit). Elle se perd, cherche son chemin et trouve le bon (elle dira plus tard que c'est grâce à une médium qui lui avait dit de tourner à gauche après avoir survolé un lac en forme d'huître).
Après 4h15 de vol, Adrienne Bolland se pose à Santiago du Chili, plus exactement à l'école militaire d'aviation. << J'étais convaincue de ne jamais sortir vivante de cette traversée... >> dira t-elle.
Elle reçoit un accueil triomphal à Santiago - seul bémol, le Consul de France sur place, qui croit à un canular, ne prend pas la peine de se déplacer. L'accueil au retour à Buenos Aires est aussi un triomphe. Les journaux locaux ne parlent que d'elle, alors qu'en France, dans un premier temps, là aussi on croit à un canular - il faut dire que la date choisie, le 1er avril...
Après une tournée en Argentine et en Uruguay, elle revient en France en juillet 1921. Elle est une vraie célébrité maintenant. Elle participe à de nombreux rassemblements aériens (on ne dit pas encore meeting) et émerveille la foule par son pilotage très sûr et très technique. Mais aussi par ses acrobaties aériennes ! Elle deviendra même ''acrobate de l'air''. En mai 1924, elle bat le record féminin de looping avec 262 boucles en 72 minutes à bord de son Caudron C.27F.
Engagée auprès des femmes (notamment le droit de vote) et aussi politiquement, mais aussi en Résistance pendant la 2ème guerre mondiale, Adrienne Bolland aura une vie très active jusqu'à son décès le 18 mars 1975 à 79 ans. Mais d'autres publications, surtout cette année, vous raconteront mieux que moi la vie riche et passionnante d'Adrienne Bolland.
Je me suis juste focalisé sur son exploit de la première traversée de la Cordillère des Andes dont nous célébrons les 100 ans ce 1er avril.
Il y a notamment Adrienne Bolland ou les ailes de la liberté de Coline Béry, paru en mars 2020 qui est vraiment très bien. L'auteure a publié plusieurs écrits sur Adrienne Bolland dont une biographie et une chronologie très très complète. Via la Collection Corde Raide (cliquez ICI), l'auteure a publié également d'autres ouvrages ainsi qu'une websérie ''Adrienne Bolland, l'Art de piloter sa vie'' sur Youtube (cliquez ICI).
Sous son nom d'artiste (si j'ai bien compris) d'Anne Vanier, illustratrice et plasticienne, elle a publié une série de 4 très jolies cartes (du moins, je crois, je n'en ai que 4 😉) rendant hommage à Adrienne Bolland (on lui pardonne les petites ''erreurs'' tellement elles sont jolies. Les cartes ont aussi été reproduites sur des timbres (montimbreamoi qui permet de se créer ses propres timbres sous certaines conditions).
Pour le 50ème anniversaire de la Traversée, Air France affrète spécialement un avion pour Adrienne Bolland et 30 de ses amis. Leur traversée va aller de Rio de Janeiro à Santiago du Chili, tout en passant par Montevidéo, Buenos Aires, Mendoza.
ici, une enveloppe ayant volé à bord de Mendoza à Santiago
Le célèbre magazine aéronautique Icare a consacré une partie d'un de ses numéros, le n° 58, à Adrienne Bolland en 1971.
La poste française rend hommage à Adrienne Bolland par l'émission d'un timbre le 22 octobre 2005. Timbre dessiné par Christophe Drochon et gravé par André Lavergne.
Le dessin est tirée d'un célèbre portrait de l'aviatrice et on peut y voir l'Aconcagua.
Le timbre sera vendu sous forme de feuille de 10 timbres.
Les postes argentine et chilienne vont eux émettre deux cachets postaux commémoratifs.
Crédit : Collection Stéphane Sebile / Spacemen1969
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